Ces derniers temps, on peut pas dire que notre groupe soit opérationnel. Tout a commencé en mission... J'étais (encore) une fois mis de côté alors que les autres agissaient directement sur le terrain. Avec Ramiel... On parlait et c'était plutôt sympa vu comme ça. Seulement, c'était ennuyant comparé aux frissons que pouvaient provoquer un combat réel. Coup du sort, ce jour-là, j'avais été plutôt chanceux de ne pas être de la partie. Il semblerait que mon frère avait mal compris les ordres et qu'il n'avait pas tiré sur le bon opposant mais plutôt sur celui d'à côté, qui n'était en rien utile aux gardes. Le "cerveau" de l'opération étant toujours vivant, Nathanaël et les autres se retrouvaient dans une situation assez délicate... Et même après s'en être sorti, ça avait gueulé sévère.

Résultat des courses, deux camps s'étaient formé : l'un défendant Antoine et contestant Azraël sur le fait de se passer de mon frère lors des actions à distance, et l'autre soutenant le chef... Nathanaël était du deuxième camp et était assez remonté contre Antoine. Après tout, il avait bien failli y laisser sa peau. Comme chaque membre était arqué sur ses positions, moi et Ramiel devions vite trancher. Ça m'énervait ces broutilles qui ne duraient que, tout au plus, un jour ou deux. Les Archanges avaient beau se séparer durant ce laps de temps, tous savaient que chacun dépendait l'un de l'autre.

D'habitude, je n'avais pas à trancher directement entre Nathanaël et Antoine. Tous les deux avaient des avis assez compatibles, en fait. Mais cette fois-là, ce ne fut manifestement pas le cas. Le choix était difficile, d'autant plus que j'étais assez réputé pour me ranger du côté gagnant. Et là, celui d'Azraël était dans son droit. Sauf qu'en face, il s'agissait de mon frère et notre passé en commun faisait que je me devais de l'épauler. Il était assez brisé comme ça pour que je ne lui tourne le dos.

- Vous deux, faites votre choix ! grommela Azraël.

Ramiel l'ignora, préférant s'adonner à ses activités habituelles. Le chef grinça des dents, mais connaissait suffisamment Ramiel pour savoir qu'aucune menace ne serait assez efficace pour le faire réagir. Bien qu'il était immature, il n'était pas non plus demeuré et je l'en remercia quelque part.
Désormais, les yeux étaient braqués sur moi. Mais ce que je sentais le plus, c'était les yeux des deux personnes comptant le plus pour moi. J'avais voulu jouer la carte de l'indifférence sauf que dans ce contexte, cela n'aurait pas marché.

Pour la première fois depuis longtemps, je me suis rangé du côté de ceux qui n'avaient pas raison. Du côté de mon frère. Je lui devais au moins ça, je voulais le rassurer, lui dire indirectement qu'il pouvait encore compter sur moi. L'expression de Nathanaël devant mon choix fut sans appel. Il était déçu, très déçu. Ses yeux s'assombrirent et il me serait difficile de me faire pardonner. Je le savais.

A ma grande surprise, cet incident s'étala sur une semaine durant laquelle je ne pu approcher Nathanaël. Mon frère, lui, semblait très reconnaissant à mon égard et me le rendait bien. C'étaient des petits gestes, mais cela me permettait de retrouver une part de mon frère longtemps perdue. Toutefois, sa présence ne remplaçait celle de celui que j'aimais. J'étais pourtant trop fier pour tenter quoi que ce soit sans être sûr que cela marche. Et lorsque enfin je pu être auprès de lui, je saisi l'occasion.

C'était le seul qui me faisait cet effet-là. Cet effet où on se sent totalement désemparé, totalement con. Presque à sourire, même en situation de crise comme celle-ci. J'avais l'air complètement débile, et son regard légèrement amusé ne pu que me conforter dans cette idée. Mais voilà, je l'aimais et je ne pouvais rien faire contre. J'étais même heureux de l'être comme ça.
J'avais voulu que ma bouche produise un son, rien qu'un petit "Pardon.". Mais à ce jeu, Nathanaël était le plus rapide.

- C'est inutile. Je sais pourquoi tu as fait ce choix. Au fond, tu t'en foutais bien de la raison, hein ?

J'hochai la tête, grimaçant un peu.

- Ah vraiment... Gabriel est un incorrigible gamin.

Je le frappai à l'épaule, devant me mettre légèrement sur la pointe des pieds :

- M'appelle pas comme ça ! Et je sais !

Il m'embrassa sur le front puis nous échangeâmes un baiser langoureux qui me fit comprendre qu'il ne m'en voulait plus.

- Azraël est furax mais ça lui passera. Ton frère est un vrai pot d'colle et j'avoue que ça m'énerve... Mais les Archanges ne seraient pas les Archanges s'il n'était pas là.

Lorsqu'il me dit ces paroles, j'avais la tête posée sur son cœur, écoutant chacun de ses battements. Tout ce qu'il disait, je le savais. Mais je m'en foutais, ça n'comptait plus là. Cette histoire à la con était encore et toujours une histoire à la con.

*Et parce que même avec des armes, on reste de vulgaires gamins...*